Incapable de comprendre ce qui venait de lui arriver, Eve
regarda Dean.
Elle n'avait rien d'une nymphomane qui s'affole au plus
léger contact. Comme toutes les femmes, elle n'avait jamais
atteint un orgasme aussi fulgurant sans un long travail
préparatoire, et s'il lui était arrivé plus d'une fois de ressentir
du plaisir au cours de jeux sexuels, ce qui venait de se
passer allait au-delà.
Elle n'aurait pas su mettre un nom sur ce qui venait de se
produire.
— Ça va ? demanda Dean en souriant.
Eve avait l'esprit embrumé et se sentait... mer-
veilleusement comblée. Un agréable picotement, comme
une pulsation extrêmement délicate, parcourait ses
membres. Elle avait l'impression que son ventre était à la
fois très lourd et léger comme une bulle de savon.
— Eve? s'enquit-il, accentuant son sourire.
Elle le dévisageait toujours d'un air stupéfait. Incapable
de prononcer un mot, elle posa la main sur sa joue, caressa
le bleu qui couronnait sa pommette et celui qui ombrait sa
mâchoire.
Dean était vraiment un homme exceptionnel.
— Bon sang, Eve, arrête de me faire languir ! dit-il
avant de planter un baiser sur ses lèvres entrouvertes.
Tu ne veux pas me dire où est ta chambre ?
Impressionnée par sa maîtrise de soi, Eve baissa les yeux
vers sa bouche et soupira.
— Très bien ! Je la trouverai sans ton aide. Voyant qu'il
s'engageait dans la mauvaise direction, elle se força à parler.
— Traverse le salon, première porte à gauche.
Dans ses bras, Eve avait l'impression de ne pas peser
plus lourd qu'une plume. Elle laissa aller sa tête contre son
épaule.
— Tu es bon.
Elle savait que ce n'était pas le mot qui convenait, mais
tant pis.
— Bon ? répéta-t-il d'un ton amusé. Je crois qu'il est
encore trop tôt pour que tu puisses en juger...
Eve sentit aussitôt le désir resurgir. Dean montrait une
telle assurance que cela suffisait à l'exciter.
— Je ne sais pas si j'aurai la force de continuer.
— Fais-moi confiance, répondit-il en plissant les yeux.
Non seulement tu peux, mais tu veux.
Dean avait un tempérament dominateur et pourtant. .. il ne
cherchait pas à dominer. Sa personnalité était si complexe
qu'elle ne le comprenait absolument pas. Elle n'était sûre que
d'une chose : leur entente sexuelle la faisait complètement
fondre.
Et lui ? Qu'en pensait-il ?
Il la déposa sur le lit et retira son T-shirt.
Mon Dieu ! Un corps humain pouvait-il vraiment atteindre
une telle perfection ? Couvert d'ecchymoses et de cicatrices,
le torse de Dean n'en demeurait pas moins splendide.
Savoir qu'il était blessé et le constater de ses propres yeux
étaient deux choses distinctes. Tout à coup soucieuse, Eve se
hissa sur les coudes.
— Tu es sûr que ça va, Dean ?
— Ce n'est rien.
— Ça doit quand même faire mal, insista-t-elle.
— Pour l'instant, chuchota-t-il, je ne sens rien du tout.
Le regard rivé sur ses seins nus, il retira ses chaussures
puis, sans manifester la moindre pudeur, ouvrit sa braguette
et se dépouilla de son pantalon et de son caleçon d'un même
mouvement.
Un indice incita Eve à penser que Dean ressentait tout de
même quelque chose. Un indice de taille conséquente...
Eve avait déjà rencontré des hommes au physique
agréable, mais c'était la première fois qu'elle était confrontée
à une plastique aussi impressionnante. Jamais elle ne s'était
sentie aussi... désirée.
Jamais elle n'avait été intime avec un homme aussi
somptueux, et ce soir, il était tout à elle.
— Tu as l'air bien songeuse, subitement. À quoi penses-tu,
Eve ?
Dean lisait-il dans les pensées? Elle se passa la langue sur
les lèvres.
— Je pense que tu es l'homme le plus renversant que j'aie
jamais vu.
Bizarrement, ce compliment lui fît froncer les sourcils.
— Si tu as l'intention de rêvasser sur moi, permets-moi au
moins de te donner de bonnes raisons de le faire, répliqua-t-il
en lui écartant les genoux de façon à se placer entre ses
jambes.
Un sursaut d'excitation la traversa. La toison de son torse
était légèrement plus foncée que ses cheveux.
— Heureusement que tu ne t epiles pas, dit-elle en faisant
glisser les mains sur son torse.
Il plissa le front, comme si elle était finalement parvenue à
le surprendre.
— Je n'ai pas de temps à consacrer à des bêtises de ce
genre.
— Tant mieux.
Au moindre de ses mouvements, ses muscles jouaient sous
sa peau. Ils étaient si développés qu'il ne devait pas avoir une
once de graisse. Tout en lui était... grand. Ses mains, ses
pieds, ses épaules, ses biceps, son torse.
Son érection.
— On va aller moins vite, cette fois, murmura-t-il.
Eve renversa la tête en arrière et ferma les yeux.
Vite ? Dean estimait-il que le supplice auquel il venait de la
soumettre n'avait pas duré assez longtemps ?
Les paumes de ses grandes mains glissèrent de ses genoux
à ses cuisses, puis remontèrent sur ses hanches. 11 attrapa
l'élastique de sa culotte et la baissa autant qu'il put.
Le regard rivé au sien, Dean fit courir les doigts sur son
ventre, ses hanches et ses cuisses. Ses caresses liaient si
légères qu'elles l'auraient chatouillée si elle n'avait pas été
aussi excitée.
Soudain, il s'écarta d'elle, amena sa culotte au niveau de
ses chevilles et la lui retira.
— Comment s'enlève cette robe ?
— Il y a une fermeture dans le dos.
— Alors mets-toi sur le ventre, dit-il avec un sourire
prometteur.
Sans attendre qu'elle lui obéisse, il la retourna avec
aisance, mais au lieu de s'attaquer à la fermeture, il demeura
un instant immobile et silencieux. Eve sentit bientôt son
souffle au bas de sa colonne vertébrale.
— Tu as vraiment de belles fesses...
Sans autre avertissement, il entreprit de les couvrir de
baisers et Eve s'agrippa au couvre-lit.
— Dean...
Il lui mordilla la fesse une dernière fois et se redressa pour
faire glisser la fermeture de sa robe, la remit sur le dos et
l'aida à s'en débarrasser.
Les traits tendus, il admira longuement son corps nu. Sans
la quitter des yeux, il attrapa un préservatif dans la poche de
son jean.
— Tu prends la pilule ?
— Oui.
— Bien. On n'est jamais trop prudent, par les temps qui
courent.
Il enfila le préservatif, cala ses hanches entre ses jambes
puis, tel un homme à bout de patience, s'empara voracement
de sa bouche.
Mais il ne la pénétra pas. Immobile, il l'embrassait à pleine
bouche, révélant un savoir-faire qui enflamma Eve.
— Dean ? dit-elle une seconde après qu'il eut libéré
sa bouche.
— Et un petit bowling ? s'enquit-il en prenant appui
sur ses coudes.
Il s'absorba dans la contemplation de ses seins, puis
gratifia son mamelon gauche d'un rapide coup de langue.
Eve inhala une longue gorgée d'air.
— Quoi ? répondit-elle, abasourdie.
— Tu n'aimes pas le bowling ?
Comment pouvait-il bavarder et s'attendre à ce qu'elle en
fasse autant quand il lui faisait des trucs comme ça ? Eve
gémit.
— Ça veut dire oui ? Je me disais que ce serait une bonne
idée pour notre deuxième rendez-vous. Je me défends, au
bowling. Je ne suis pas un champion, mais je me défends.
Il voulait certainement plaisanter. Mais si c'était comme
cela qu'il voulait jouer, cool et détaché, Eve ne demandait
qu'à le suivre.
— Bonne idée...
Il gratifia son mamelon d'un nouveau coup de langue
avant de le prendre en bouche.
— Alors c'est entendu, déclara-t-il quand il releva la tête
pour passer à l'autre sein. Bowling.
Et il plongea sur son sein droit. Il était si détendu et en
même temps si appliqué qu'il la rendait folle.
— Je me disais que...
— Tais-toi, Dean.
— Non, sérieusement... Il faudrait peut-être qu'on prenne
d'abord le temps de faire connaissance, toi et moi...
Eve attrapa son visage entre ses mains et l'amena près du
sien.
— S'il te plaît, Dean, arrête.
Il s'allongea à côté d'elle et posa une main sur son ventre.
— Je t'assure que je suis sérieux. Raconte-moi quelque
chose sur toi.
Il avait vraiment l'air sérieux. Eve serra les dents de
frustration avant de se décider à répondre.
— Qu'est-ce que tu veux savoir?
— Tout, dit-il en rivant son regard au sien tandis qu'il
immisçait sa main entre ses cuisses. Mais j'aimerais surtout
connaître tes préférences sexuelles. Est- ce que tu aimes le
sexe oral, par exemple ?
Ses doigts habiles flattèrent sa fente avant de la pénétrer.
D'un seul coup et profondément. Ils allaient et venaient en
elle, ressortaient pour entourer son clitoris, puis
l'envahissaient à nouveau.
— Oui.
— Tu aimes ça ?
— Oui, je... Oui.
Son regard l'emprisonnait. Eve cambra le dos.
— Ah ! C'est là que ça te plaît, hein ?
Oui, c'était là. Exactement là.
Son pouce entra dans la danse, glissant avec légèreté sur
sa chair. Encore et encore, jusqu'à ce que ses hanches
pressent contre sa main pour l'inciter à accentuer la caresse.
— Donner ou recevoir ? questionna-t-il d'une voix rauque.
Sans comprendre, elle secoua la tête.
— Tu aimes qu'on t'embrasse là, Eve ? demanda-t-il en
enfonçant profondément ses doigts en elle.
Une pulsation intense s'éleva en elle, et elle sut qu'elle
n'allait pas tarder à jouir.
— Oui, souffla-t-elle en essayant de résister pour sentir sa
bouche sur elle.
Maintenant qu'il y avait fait allusion, elle ne pensait plus
qu'à ça. L'expression de Dean n'avait pas varié d'un pouce,
mais elle lut son plaisir sur son visage et devina que son
excitation venait d'atteindre un nouveau palier.
— Exactement ce que j'avais envie d'entendre.
Il pencha la tête jusqu'à ce que ses lèvres effleurent ses
côtes, et quand il descendit du lit pour s'agenouiller par terre,
il fit glisser la pointe de sa langue jusqu'au creux de son
nombril.
Eve se raidit. Son cœur battait à toute allure.
— J'adore ton odeur.
Il mordilla sa hanche et elle sursauta, puis ferma les yeux
et s'agrippa au couvre-lit.
Elle sentit la soie de ses cheveux caresser ses cuisses
lorsqu'il les écarta en lui faisant plier les genoux de façon
qu'elle s'offre totalement à lui. Elle se laissa faire et retint son
souffle.
L'espace de trois battements de cœur, tout s'immobilisa
dans la chambre, et Eve sut qu'il la regardait. Ce qu'il vit ne
dut cependant pas lui suffire car ses doigts écartèrent ses
lèvres. À l'instant précis où elle décida qu'elle ne supportait
plus qu'il la scrute en silence, elle l'entendit émettre un son
rauque, puis sentit son souffle, ses lèvres et sa langue.
Elle creusa les reins et ses hanches ondulèrent pour presser
son sexe contre sa bouche. C'était tellement bon que cela
devenait rapidement insupportable.
Dean plaqua les mains sur ses cuisses de manière à
l'immobiliser, l'empêchant de se dérober au plaisir, et il suffit
de quelques secondes pour que déferle un nouvel orgasme.
Mais Dean ne s'écarta pas pour autant.
Insatiable, il lapait avidement l'essence de son plaisir,
mangeait son sexe, la dévorait toute crue.
Eve lui passa une main dans les cheveux.
— Arrête, gémit-elle.
La pointe de sa langue descendit le long de sa fente et elle
poussa un cri.
— Je t'en supplie, Dean, c'est trop, arrête !
Il amena sa bouche au niveau de la sienne en prenant tout
le temps de faire glisser sa langue sur son corps, déposant de-
ci de-là des petits baisers et des suçons aussi erotiques que
tout ce qui avait précédé.
Eve sentit des larmes troubler sa vision.
— Je me sens dévastée.
Il releva la tête pour l'observer, les traits tendus, le regard
obscurci par le désir. Sa mâchoire se contracta et il prit son
visage entre ses mains.
Alors, d'une seule poussée, il la pénétra.
Eve, surprise par la soudaineté de l'assaut, laissa échapper
un cri, ravie de le sentir enfin en elle.
Le regard de Dean était brûlant. L'heure n'était plus aux
sourires et aux taquineries.
— Content que ça t'ait réveillée. Tu as un goût délicieux,
ajouta-t-il contre ses lèvres.
Il se mit à aller et venir en elle sur un rythme nonchalant,
et Eve accompagna instinctivement ses poussées.
— Tu me combles de plaisir, Dean.
Il enfouit les doigts dans ses cheveux et plaça son front
contre le sien.
— Tant mieux, répliqua-t-il sans changer de rythme, parce
que j'ai envie de toi depuis que j'ai posé les yeux sur toi, dans
ce bar miteux.
Malgré le délicieux brouillard qui l'enveloppait, Eve
trouva cela flatteur. Très flatteur.
Et cette fois, ce fut elle qui l'embrassa. Il grimaça quand
elle écarta les cheveux de son visage, et elle aperçut les
points de suture en haut de son front.
— Excuse-moi.
— Ce n'est rien.
Prenait-il toute blessure corporelle aussi légèrement ?
Probablement. Eve en fut émue. Un peu triste aussi. Et...
— Non, dit-il d'une voix rauque en la pénétrant un peu
plus brutalement. Reste avec moi, Eve. J'ai besoin de toi.
Comment devinait-il aussi facilement ses pensées ?
— Je suis là, répondit-elle doucement.
Le regard rivé au sien, il recouvrit un sein d'une main et,
du bout des doigts, joua avec le mamelon avant d'en pincer
fortement l'extrémité.
Elle déglutit violemment, non pas de douleur, mais sous
l'effet d'une fulgurante décharge de plaisir.
— C'est mieux, chuchota-t-il.
Eve passa les jambes autour de sa taille et sut à l'intensité
de son regard que Dean appréciait. Elle posa une main sur
son épaule et sourit.
— Dean ?
— Mmm?
— J'aime vraiment le sexe oral.
Dean ferma brièvement les yeux.
— C'est ce qui m'a semblé, oui.
Elle vit qu'il était au bord du plaisir, mais qu'il se retenait.
— J'aime autant donner que recevoir, murmura-
t-elle.
Une lueur de désir pur traversa son regard. Son corps se
tendit et il se retira afin de mieux reprendre possession d'elle.
Plus fort, plus vite.
— C'est bon à savoir...
Il abandonna son sein pour glisser une main sous ses
fesses et lui souleva les hanches de façon à la pénétrer à
fond.
Eve écarta les lèvres et sa respiration devint sifflante.
Les doigts de Dean se contractèrent sur ses fesses.
— Ça va?
Elle réussit à hocher la tête. Avec Dean, elle apprenait sur
elle-même des choses qu'elle ignorait - que le plaisir et
l'inconfort pouvaient se combiner avec beaucoup de charme,
par exemple.
Ses ongles s'enfoncèrent dans ses épaules.
Dean ne se plaignit pas, mais scruta attentivement son
visage.
— Je ne veux pas te faire mal, Eve.
Sa prévenance l'échauffa. Elle sentit qu'il allait se retirer et
le retint avec ses chevilles.
— Tu ne me fais pas mal. Au contraire.
Il étudia son visage encore un moment, puis recouvrit sa
bouche d'un long baiser affamé.
— Tant mieux. Maintenant, jouis encore pour moi. Encore
? Elle ne pouvait quand même pas...
— Encore, Eve.
La position dans laquelle il la maintenait lui permettait de
frotter contre son clitoris chaque fois qu'il la pénétrait, et Eve
se dit... que c'était peut-être possible.
Quand son corps se raidit, bandant tous ses muscles, elle
s'agrippa à lui, ferma les yeux et le rejoignit alors qu'il
s'abandonnait en elle.
Un peu plus tard, Eve reprit progressivement conscience à
travers un voile de fatigue et d'extase. Elle avait mis plus de
temps à récupérer cette fois-ci, mais Dean ne faisait pas un
geste pour s'écarter. Elle percevait les battements précipités
de son cœur contre ses seins.
La sueur soudait leurs corps et chaque fois qu'elle
inspirait, le parfum mêlé de leurs peaux emplissait ses
poumons.
Abasourdie, stupéfaite, comme frappée par la foudre, Eve
regardait dans le vide.
Trois fois. Il l'avait fait jouir trois fois de suite.
Qui l'eût cru ?
Bon, elle avait lu dans des livres que c'était possible. Mais
elle pensait que c'étaient des mensonges parce que ça ne lui
était jamais arrivé.
En tout cas, elle était désormais sûre d'une chose. Après ce
que venait de lui faire Dean, elle ne serait plus la même. Et
comme il n'avait pas l'intention de s'éterniser à Harmony,
cette certitude avait quelque chose de désagréable.
Parce qu'elle savait qu'aucun autre homme ne supporterait
la comparaison avec lui.