12

On frappa à la porte d'Eve à l'instant précis où elle

remontait la fermeture Éclair de sa robe préférée. C'était une

petite robe très féminine, taillée dans un crêpe fleuri qui

mettait merveilleusement en valeur les courbes de son corps.

Elle enfila des sandales à hauts talons et se dirigea vers la

porte en ajustant ses boucles d'oreilles.

Il était encore très tôt. Elle ouvrit avec curiosité... et sourit

de plaisir en découvrant son visiteur.

— Bonjour, toi, dit Dean.

— Salut.

Vêtu d'un jean et d'un T-shirt blanc immaculé, il jeta un

coup d'œil derrière elle pour vérifier qu'elle était seule.

Rassuré, il passa un bras autour de sa taille et l'embrassa.

— Tu as encore meilleur goût que dans mon souvenir.

— Toi aussi, répliqua-t-elle en s'écartant pour le laisser

entrer. Mais tu arrives au mauvais moment. Je dois partir

dans dix minutes.

— Ce n'est pas grave, je ne peux pas rester, de toute façon,

déclara-t-il en la suivant dans la cuisine. Je voulais juste

m'excuser d'être parti aussi brusquement hier soir.

— Tu plaisantes, j'imagine ? dit-elle avant de porter une

tasse de café à ses lèvres. Je tiens beaucoup à ce que tu

consacres du temps à tes sœurs. J'espérais même...

Dean tendit les mains devant lui.

— Ne t'engage surtout pas sur cette voie.

— Comme tu voudras, répondit-elle en déposant sa tasse

dans l'évier.

Elle se retourna, s'approcha de lui et prit son beau visage

marqué entre ses mains. Même rasé de frais il avait l'air

fatigué... et tellement séduisant qu'elle eut envie d'annuler

tous ses rendez-vous pour passer la journée au lit avec lui.

— Je suis la meilleure amie de Cam. Tu es son frère

et je couche avec toi. Attends-toi à ce que le sujet

refasse surface.

Dean plaqua une main sur ses fesses de façon à caler

intimement son corps contre le sien.

— Maintenant que tu m'as dit la seule chose que

je voulais savoir - qu'il ne s'agissait pas entre nous

d'une histoire sans lendemain -, je crains que le sujet

ne refasse déjà surface, comme tu le dis si joliment...

Eve rit, lui donna une tape et chercha à se dégager. Dean

n'eut aucun mal à la retenir.

— Dean... fit-elle mine de se plaindre.

— Eve, murmura-t-il en enfouissant son nez dans son cou.

Notre rendez-vous de ce soir tombe à l'eau.

— Je vois, répliqua-t-elle, déçue.

— Mais je pourrai te retrouver un peu plus tard...

La pointe de sa langue effleura le lobe de son oreille,

provoquant un frisson.

— ... vers neuf heures, si ça te convient.

Il devait plaisanter. Elle renversa légèrement le buste en

arrière pour scruter son visage. Il semblait tout à fait sérieux.

Quel toupet !

— Pour tirer un coup ? s'informa-t-elle d'un ton glacial.

Son sourire bouleversa ses sens, déjà très perturbés.

— Disons que je suis optimiste.

Il s'était arrangé pour glisser sa jambe entre les siennes, et

Eve sentit subitement ses pieds quitter le sol. Leurs ventres

entrèrent en contact, ses seins s'écrasèrent contre son torse et

son cœur se mit à palpiter follement.

- Tu en as envie, toi aussi.

C’était vrai, mais elle se serait fait hacher menu que de

l'avouer.

- Dans tes rêves, gros malin. Tu ferais mieux i l'oublier.

- Tu paries ?

Comment pouvait-il afficher autant d'assurance ? C'était

irritant au possible. Et tellement séduisant...

— Sans problème. Je suis sûre de gagner.

— Mmm. Qu'est-ce que tu serais prête à parier? Son

regard plongea dans l'échancrure de sa robe.

— Tout ce que tu veux, répondit-elle pour cesser de

penser à la brûlure de son regard sur ses seins. À toi de

décider.

— D'accord, fit-il avec un grand sourire.

Il planta un rapide baiser sur ses lèvres.

— Laisse-moi d'abord te dire que je ne pourrai pas sortir

avec toi parce que le toit de Cam menace de s'effondrer et

que ses réparations de fortune ne servent à rien. Je vais donc

passer prendre ma nouvelle voiture chez le concessionnaire,

après quoi j'irai acheter des tuiles neuves et louer les outils

nécessaires.

— Tu vas réparer le toit de sa maison ?

Il haussa les épaules.

— Pourquoi pas ? Je le ferai aussi bien qu'un

professionnel, j'ai du temps devant moi et, si tout va bien,

j'aurai fini avant la prochaine averse.

Touchée par son dévouement, Eve se pelotonna contre lui.

— C'est très gentil de ta part.

— Ce n'est franchement pas grand-chose, grommela-t-il. Il

n'y a pas de quoi s'extasier.

Eve dissimula son sourire contre son épaule. Dean ne

supportait vraiment pas qu'on le suspecte d'être gentil.

— Dean, je ne sais pas si c'est à moi de te le dire, mais je

crains fort que Cam n'ait même pas les moyens de payer des

tuiles neuves.

Les doigts de Dean glissèrent sur ses fesses, descendirent

le long de ses cuisses et remontèrent sous sa robe.

— Elle n'aura pas besoin de les payer. Lorna a reçu de

quoi payer ce genre de choses.

— Si tu crois que Lorna te paiera, tu t'illusionnes, Dean.

Cette femme n'a jamais...

— Chuuut. J'en fais mon affaire.

Ses doigts s'immisçaient sous l'élastique de sa culotte. Le

souffle coupé, Eve ferma les yeux et s'efforça de retrouver

son contrôle. Dean venait de faire un pas de géant dans la

vie de sa sœur et elle avait envie d'en parler avec lui, mais

elle en serait incapable si sa main persistait à lui faire des

choses aussi scandaleuses.

— Il faut que... tu arrêtes ce que tu es en train de faire.

— D'accord.

Elle sentit ses pieds toucher le sol, puis Dean la fit

reculer et son dos entra en contact avec le mur.

— Tu as encore cinq minutes devant toi, non ?

— Oui, mais pas une de plus.

Il sourit et insinua sa main entre ses cuisses.

— Cinq minutes te suffisent peut-être, mais moi, j'ai

besoin d'un peu plus... protesta-t-elle.

Ses doigts remuèrent imperceptiblement et elle déglutit.

— Ô mon Dieu ! Mais comment fais-tu ça ?

Les lèvres de Dean effleurèrent sa tempe tandis que ses

doigts experts continuaient à explorer sa fente.

— Détends-toi, d'accord ? J'ai envie de m'amuser

avec toi cinq minutes.

Eve avait du mal à rester immobile. Le jeu de ses doigts

était à la fois tendre et déterminé, et elle sentit poindre un

début d'orgasme au creux de son ventre.

— Mais Dean... je n'aurai pas le temps de me rhabiller !

— Ce ne sera pas la peine.

Il interrompit la délicieuse torture, le temps de faire

glisser sa culotte jusqu'à ses chevilles.

Enjambe-la.

Tu vas froisser ma robe et tout le monde devinera i r

que j'ai fait.

Son léger rire lui fit l'effet d'une caresse.

— Personne ne verra rien, je t'en donne ma parole i

l'honneur.

Il mit un genou en terre et l'aida à se débarrasser de su

culotte, puis traça un chemin de baisers jusqu'à sa hanche.

Quand il se redressa, il plongea son regard dans le sien et

Eve sut qu'elle ferait tout ce qu'il voudrait.

— Je n'arrive pas à croire que je suis en train de faire ça.

— Crois-moi, ce n'est pas un rêve. C'est beaucoup

mieux...

Il se débraguetta et lui tendit un préservatif.

— Au travail, Eve ! On n'a plus beaucoup de temps.

Le regard braqué sur son sexe en érection, Eve sentit sa

bouche devenir sèche. Il l'avait à peine embrassée, ses

seins étaient toujours à l'abri de son soutien-gorge.

Pourtant, elle était follement excitée. Ses yeux remontèrent

vers ceux de Dean et elle défit l'emballage du préservatif

avec ses dents. Un sentiment d'urgence lui picotait les

yeux.

— Allumeuse, l'accusa-t-il.

— Tu peux parler !

Ses mains tremblaient lorsqu'elles se posèrent sur son

sexe. Il était chaud et ferme. Elle le caressa, effleura du

pouce son gland velouté. Une goutte de liquide translucide

perla à son extrémité et elle entendit Dean retenir son souffle.

— Dépêche-toi.

— Silence !

Eve prit tout le temps nécessaire pour lui enfiler le

préservatif. Il ferma les yeux, laissa échapper un grognement

et elle sentit sa bouche s'emparer voracement de la sienne

tandis qu'il ajustait leur position. Il l'avait soulevée contre le

mur et l'aidait à passer les jambes autour de sa taille.

— Appuie-toi sur mes épaules. Eve lui

obéit - et il la pénétra.

Dean !

Sa bouche recouvrit la sienne et les mouvements de sa

langue imitèrent ceux de son sexe. Des étincelles surgirent

sous les paupières closes d'Eve. Un arc de tension lui fit

subitement cambrer les reins, si fulgurant qu'elle n'avait pas

eu le temps de le sentir venir.

Dean bascula les hanches en avant de façon à effleurer son

clitoris à chacun de ses coups de reins. Il la serra plus

étroitement contre lui et Eve sombra instantanément dans

l'orgasme.

Elle écarta sa bouche pour libérer un cri, consciente du

regard de Dean sur elle, ravie de s'abandonner totalement au

plaisir. Elle n'avait jamais ressenti quelque chose d'aussi

intense. C'était trop. Trop fort. Trop fou.

Tellement simple et délicieusement enveloppant.

Quand le plaisir se mit à décroître, elle dut aspirer l'air à

petits coups rapides pour se retenir de pleurer. Elle se

sentait... merveilleusement détendue et complètement vidée.

Éprise.

La soirée de la veille l'avait bouleversée et elle n'avait pas

cessé d'y repenser depuis. Aujourd'hui, Dean venait de lui

apporter la preuve qu'il avait sur elle plus de pouvoir

qu'aucun autre homme. Qu'il y consacre des heures ou cinq

minutes, il pouvait faire d'elle ce qu'il voulait, lui faire

renoncer à toutes ses convictions, peut-être même à sa fierté.

C'était presque effrayant. Presque.

— Tu es un magicien ou un sorcier, c'est ça ?

Dean avait laissé aller sa tête au creux de son épaule,

haletant.

— Je n'ai plus qu'une minute devant moi. J'en ai

besoin pour reprendre mon souffle, si tu permets.

Eve sourit, éblouie par sa phénoménale virilité. Elle

enfouit les doigts dans ses cheveux.

— Tu devrais être au lit.

— Avec toi ? Pas bête.

Elle rit et secoua la tête.

— Non. En convalescence.

— Nettement moins intéressant.

Il se redressa, la dévisagea, et l'embrassa à nouveau avant

de faire glisser ses jambes le long des siennes jusqu'à ce que

ses pieds touchent le sol.

— Tu as besoin de faire un tour dans la salle de bains ?

— Oui, répondit-elle avant de donner un coup de pied à sa

culotte qui traînait par terre. Mais je te laisse y aller avant

moi.

Elle n'était pas certaine que ses jambes pourraient la

soutenir.

Il prit son visage entre ses mains et caressa ses joues du

bout des pouces.

— D'accord.

Il se rebraguetta et traversa la maison jusqu'à la salle de

bains. Une fois seule, Eve ramassa sa culotte et passa dans la

buanderie pour se rafraîchir. Elle n'en revenait toujours pas

de la facilité avec laquelle elle s'était laissé séduire. Comme

s'il lui avait suffi d'agiter une baguette magique. Si elle tenait

à rester lucide, elle avait intérêt à mettre de la distance entre

eux.

Dean réapparut. Il réussissait à avoir l'air malicieux et

vulnérable en même temps.

— Alors c'est d'accord pour ce soir, neuf heures ?

Les bonnes résolutions d'Eve s'envolèrent à cette

perspective.

— Tu veux toujours? Je veux dire, après...

— Oui. Je veux toujours. Encore plus que tout à l'heure.

Eve ressentait exactement la même chose. Elle poussa un

soupir de soulagement et sourit.

— Alors d'accord.

— Ce qui signifie que j'ai gagné notre pari, conclut-il avec

un grand sourire.

Eve réfléchit et ne mit pas longtemps à comprendre ce

qu'il voulait dire.

— Attends une minute...

— Impossible, ça me retarderait. Mais ne t'inquiète pas, tu

seras ravie d'honorer ta dette, assura-t-il après l'avoir rejointe

en deux enjambées.

— Dean...

Il écarta toute contestation d'un baiser et l'abandonna,

muette, frustrée et en proie à toutes les conjectures.

Dean laissa son subconscient lui indiquer le chemin à

suivre pour arriver chez le concessionnaire. Au niveau

conscient, il était incapable de distinguer sa droite de sa

gauche.

Lorsqu'il était passé voir Eve, il n'avait pas eu l'intention

de faire l'amour. Pas la moindre. Il s'était dit qu'il annulerait

leur rendez-vous et qu'ils en resteraient là. Tant pis si elle le

prenait mal.

Mais il avait suffi qu'il pose les yeux sur elle, qu'il entende

le son de sa voix et respire son parfum pour oublier son

projet.

Que ressentait-elle à présent? Était-elle gênée ou sub-

juguée ? S'il continuait comme ça, elle allait le prendre pour

un monstre de domination. C'est vrai qu'il aimait bien la

dominer sexuellement. Il adorait ça, même.

C'était bien là le problème.

Après l'avoir quittée la veille, il n'avait pas pu s'empêcher

de penser à elle. Jacki proférait une bêtise, et il se disait qu'il

le raconterait à Eve. Il apercevait Cam perchée sur le toit au

milieu de la tempête, et il se disait aussitôt qu'il faudrait lui

décrire cette scène. Lorna le traitait comme un odieux

parasite, et au lieu de s'en irriter, il imaginait le sourire d'Eve

quand elle écouterait son récit.

Il ne pouvait pas s'en empêcher, c'était plus fort que lui.

Comme si cela ne suffisait pas, il était allé lui annoncer

son intention de réparer la toiture. Pourquoi en avait-il

éprouvé le besoin ? Et pour commencer, pourquoi avait-il

décidé de réparer ce toit ?

Immobilisé à un feu rouge, Dean ferma les yeux et tâcha

de s eclaircir les idées. Il allait réparer ce toit et les choses

s'arrêteraient là. Il repartirait la conscience tranquille.

En arrivant chez le concessionnaire automobile, il

remarqua une Ford Focus d'occasion sur le parking. Propre.

Pneus en bon état. Prix raisonnable...

Nom de Dieu.

Dean reporta farouchement le regard devant lui, pénétra

tambour battant dans le bureau du concessionnaire et régla

rapidement le contrat de leasing de sa voiture sans poser de

questions sur la Ford. Il avait sa Sebring ; il n'avait pas

besoin d'une autre voiture.

Réparer le toit était déjà très généreux de sa part.

Après la tempête de la veille, la brise fraîche de la matinée

était agréable. Dean baissa la capote de sa voiture et se rendit

à l'agence immobilière dont la mère d'Eve lui avait donné

l'adresse. Il voulait dire à Crystal qu'il reportait sa recherche

de maison pour quelques jours.

Quand il franchit les portes vitrées de l'agence, il remonta

ses lunettes de soleil sur son front et une sympathique

hôtesse d'accueil lui indiqua le couloir conduisant au bureau

de Crystal.

Au milieu du couloir, une voix d'homme irritée parvint à

ses oreilles.

— C'est absurde ! Ce serait du gaspillage pur et simple, et

tu le sais aussi bien que moi.

— Écoute, Roger, répondit la voix de Crystal, ce ne sont

pas mes affaires. Tu n'as qu'à en parler avec Cam.

Roger. Tiens, tiens...

— Vends-moi la maison maintenant et elle n'aura pas

besoin d'entreprendre ces réparations !

— Je suis désolée, ce n'est pas à moi de décider de la mise

en vente.

Un silence orageux crépita dans l'air avant que Roger ne

riposte.

— Mets-la en vente !

Dean atteignit le bout du couloir juste à temps pour voir

Crystal quitter son fauteuil et contourner son bureau,

visiblement irritée.

— Pas avant que Cam me demande de le faire.

— J'ai essayé de la joindre, mais elle ne répond ni sur son

fixe ni sur son portable.

Crystal haussa les épaules et Roger fit un pas vers elle.

— Tu sais très bien que je suis le seul acheteur possible, et

je ne veux pas que le toit soit réparé.

— Pourquoi ? intervint Dean en s'appuyant à l'en-

cadrement de la porte.

Surpris, Roger se retourna d'un bloc, et sa surprise laissa

place à la fureur lorsqu'il reconnut Dean.

— Qu'est-ce que tu fous ici, toi ?

— Cela ne te regarde pas, mais je suis ici pour la même

raison que toi.

Le visage de Roger s'empourpra de colère et Dean précisa

:

— J'ai l'intention d'acheter une maison.

— La maison des Conor? s'enquit Roger.

? Sûrement pas, lui signifia Dean d'une grimace méprisante

avant de se tourner vers Crystal.

— Bonjour, Crystal.

Elle le serra dans ses bras, visiblement soulagée par son

apparition.

— Tu es matinal.

— Oui, mes projets ont été chamboulés. Cam doit dormir

à l'heure qu'il est, ajouta-t-il en se tournant vers Roger. Elle a

veillé tard hier soir à cause des fuites de sa toiture.

— Comment le sais-tu ? demanda Roger en plissant les

yeux.

— Parce que je l'ai aidée.

— J'ai l'impression que tu connais déjà Dean, le frère de

Cam, s'interposa Crystal avant que Roger ait le temps de

répondre.

— Son frère ? répéta-t-il, sidéré.

— Absolument, confirma Dean. Tu ne le savais pas ?

Roger était tellement transparent que Dean pouvait

déchiffrer ses pensées sur son visage.

— Non, grommela-t-il. On s'est croisés, mais je ne

savais pas...

Roger hésitait visiblement sur le parti à prendre. Attaque

frontale ou hypocrisie ? Il opta sagement pour l'hypocrisie.

— D'après ce que m'a dit Eve, tu n'as pas l'intention de

rester longtemps par ici, déclara-t-il en enfonçant les mains

dans ses poches pour ne pas avoir à lui serrer la main. Se

serait-elle trompée?

— Non. Si tu as des adresses pour moi, dit-il en se

tournant vers Crystal, je vais les prendre maintenant et j'irai y

jeter un coup d'œil un peu plus tard.

— Volontiers. Je t'ai préparé un dossier, répliqua-t-elle en

le lui remettant.

— Si tu n'as pas l'intention de rester, intervint Roger d'une

voix qui laissait percer sa colère et sa frustration, pourquoi

achètes-tu une maison ?

— C'est un investissement. Merci beaucoup, dit-il à

Crystal après avoir brièvement feuilleté le dossier. Je te

revaudrai ça.

— Après l'interrogatoire que t'ont fait subir les garçons

hier soir ? C'est plutôt moi qui te suis redevable !

— Tu es dans l'immobilier ? demanda Roger. Moi aussi.

Comme tous les mecs malins. Je ne sais pas si ta sœur te l'a

dit, mais je possède plusieurs entreprises à Harmony.

— Eve m'a dit ça, oui.

— Je vois, releva Roger, la joue agitée d'un tic nerveux.

Vous êtes ensemble, tous les deux ?

Au heu de lui répondre, Dean franchit la distance qui le

séparait de Roger.

— A mon tour, décréta-t-il.

Roger jeta un coup d'œil à Crystal, puis reporta son

attention sur Dean.

— A ton tour de quoi ?

— De mener l'interrogatoire. Pour commencer, je

voudrais savoir pourquoi tu ne veux pas que Cam fassi'

réparer la toiture de sa maison.

Roger fit visiblement un effort sur lui-même, mais il ne se

défila pas.

— Ta sœur et moi sommes fiancés.

— Ah bon ? J'ai entendu dire que rien n'était encore

conclu.

L'expression de Roger se durcit.

— Cam et moi devons finaliser notre projet. D'ici là,

je ne veux pas qu'elle s'angoisse pour des choses

inutiles. J'achète la maison, quel que soit l'état de la

toiture.

Dean hocha lentement la tête. Il n'en croyait pas un mot.

— Je t'ai entendu dire que tu étais le seul acheteur

possible. Comment ça se fait ?

— Qui d'autre en voudrait ? s'esclaffa Roger. Tu as vu

l'état de la toiture, mais tu ne sais peut-être pas que toute la

plomberie est à refaire et toutes les fenêtres à changer.

L'installation électrique est sur le point de rendre l'âme. La

climatisation fonctionne selon son humeur. Les...

— C'est bizarre, l'interrompit Dean, mais la piscine est

parfaitement entretenue. Pourquoi Cam se donne-t-elle

autant de mal pour la piscine alors que la maison tombe en

ruine ?

— Parce que Lorna utilise la piscine, tout simplement,

explicita Crystal.

— J'ai du mal à imaginer ma tante en maillot de bain...

— Non, rectifia Crystal en frémissant à cette seule idée.

Lorna utilise la piscine pour recevoir les amies de son club.

Cela expliquait l'élégant mobilier de jardin.

— Quand la pompe de la piscine est tombée en panne au

début de l'été, Roger l'a réparée à ses frais, précisa-t-elle.

— C'était très généreux de ta part.

Dean se demanda pourquoi Roger était prêt à aider Cam

pour une chose, mais pas pour une autre. Pourquoi avait-elle

accepté son aide ? C'était assez étonnant i h la part de sa

sœur, si fière et indépendante.

---Les filles aiment bien nager, se défendit Roger, et

puis ça ne coûtait pas si cher.

Evidemment qu'elles aimaient nager. Elles avaient grandi

dans une maison avec une immense piscine clans le jardin.

Dean se souvenait encore des étés de si >n enfance, des

journées passées dans l'eau à jouer et nager jusqu'à ce qu'il

soit trop fatigué pour faire autre chose que manger et dormir.

Rien, pas même un travail de force, ne fatigue autant que le

soleil et l'eau. Mais c'est une saine fatigue. Le genre de

fatigue qui permet d'évacuer les tensions et de mettre ses

problèmes à distance.

Dean prit sa décision sur un coup de tête. L'antipathie que

lui inspirait Roger la justifiait amplement.

— Ne vends pas la maison avant d'avoir eu de mes

nouvelles, dit-il à Crystal.

— Qu'est-ce que tu racontes ? s'insurgea Roger. Tu n'as

pas ton mot à dire.

— Il se trouve que c'est à moi que revient la décision

définitive.

Crystal haussa les sourcils, et ce fut autant à elle qu'à

Roger qu'il fournit une explication.

— Un tiers de cette maison m'appartient. Le fait que je ne

l'aie pas occupée ne change rien à l'affaire... et je viens de

décider que je ne veux pas la vendre, conclut-il en posant la

main sur l'épaule de Roger.

— C'est ridicule ! s'exclama celui-ci, livide de stupeur.

Cam et moi avons conclu un marché !

— Oui, mais pas toi et moi. Merci beaucoup, ajouta-t-il en

se tournant vers Crystal. On s'appelle !

— Oui, répondit-elle, un peu troublée par la tournure des

événements. À bientôt, Dean.

Roger en était encore à chercher ses mots lorsqu'il franchit

la porte. En sortant de l'agence, Dean eut le sentiment qu'un

énorme poids venait de quitter ses

— De mener l'interrogatoire. Pour commencer, je

voudrais savoir pourquoi tu ne veux pas que Cam fasse

réparer la toiture de sa maison.

Roger fit visiblement un effort sur lui-même, mais il ne se

défila pas.

— Ta sœur et moi sommes fiancés.

— Ah bon ? J'ai entendu dire que rien n'était encore

conclu.

L'expression de Roger se durcit.

— Cam et moi devons finaliser notre projet. D'ici là,

je ne veux pas qu'elle s'angoisse pour des choses inutiles.

J'achète la maison, quel que soit l'état de la toiture.

Dean hocha lentement la tête. Il n'en croyait pas un mot.

— Je t'ai entendu dire que tu étais le seul acheteur

possible. Comment ça se fait ?

— Qui d'autre en voudrait ? s'esclaffa Roger. Tu as vu

l'état de la toiture, mais tu ne sais peut-être pas que toute la

plomberie est à refaire et toutes les fenêtres à changer.

L'installation électrique est sur le point de rendre l'âme. La

climatisation fonctionne selon son humeur. Les...

— C'est bizarre, l'interrompit Dean, mais la piscine est

parfaitement entretenue. Pourquoi Cam se donne-t-elle

autant de mal pour la piscine alors que la maison tombe en

ruine ?

— Parce que Lorna utilise la piscine, tout simplement,

explicita Crystal.

— J'ai du mal à imaginer ma tante en maillot de bain...

— Non, rectifia Crystal en frémissant à cette seule idée.

Lorna utilise la piscine pour recevoir les amies de son club.

Cela expliquait l'élégant mobilier de jardin.

— Quand la pompe de la piscine est tombée en panne au

début de l'été, Roger l'a réparée à ses frais, précisa-t-elle.

— C'était très généreux de ta part.

Dean se demanda pourquoi Roger était prêt à aider Cam

pour une chose, mais pas pour une autre. Pourquoi avait-elle

accepté son aide ? C'était assez étonnant de la part de sa

sœur, si fière et indépendante.

— Les filles aiment bien nager, se défendit Roger, et

puis ça ne coûtait pas si cher.

Évidemment qu'elles aimaient nager. Elles avaient grandi

dans une maison avec une immense piscine dans le jardin.

Dean se souvenait encore des étés de son enfance, des

journées passées dans l'eau à jouer et nager jusqu'à ce qu'il

soit trop fatigué pour faire autre chose que manger et dormir.

Rien, pas même un travail de force, ne fatigue autant que le

soleil et l'eau. Mais c'est une saine fatigue. Le genre de

fatigue qui permet d'évacuer les tensions et de mettre ses

problèmes à distance.

Dean prit sa décision sur un coup de tête. L'antipathie que

lui inspirait Roger la justifiait amplement.

— Ne vends pas la maison avant d'avoir eu de mes

nouvelles, dit-il à Crystal.

— Qu'est-ce que tu racontes ? s'insurgea Roger. Tu n'as

pas ton mot à dire.

— Il se trouve que c'est à moi que revient la décision

définitive.

Crystal haussa les sourcils, et ce fut autant à elle qu'à

Roger qu'il fournit une explication.

— Un tiers de cette maison m'appartient. Le fait que je ne

l'aie pas occupée ne change rien à l'affaire... et je viens de

décider que je ne veux pas la vendre, conclut-il en posant la

main sur l'épaule de Roger.

— C'est ridicule ! s'exclama celui-ci, livide de stupeur.

Cam et moi avons conclu un marché !

— Oui, mais pas toi et moi. Merci beaucoup, ajouta-t-il en

se tournant vers Crystal. On s'appelle !

— Oui, répondit-elle, un peu troublée par la tournure des

événements. À bientôt, Dean.

Roger en était encore à chercher ses mots lorsqu'il franchit

la porte. En sortant de l'agence, Dean eut le sentiment qu'un

énorme poids venait de quitter ses épaules et la journée qui

s'annonçait lui parut subitement beaucoup plus belle.

Il attrapa son portable et composa le numéro de Gregor

qui répondit au bout de trois sonneries, le souffle court.

— Soit tu t'entraînais, soit tu faisais des folies de ton corps

!

— Dean ? Comment ça va, vieille branche ?

— Je respire mieux que toi.

— Au risque de te décevoir, je suis en plein jogging. Quoi

de neuf?

— J'ai une proposition à te faire.

— Intéressant. Je t'écoute.

— J'ai besoin d'un coup de main. Si tu acceptes de

m'aider, je m'entraînerai avec toi.

— Quoi ? Mais c'est un vrai combat que je veux, moi !

Pas un entraînement !

— On commence par s'entraîner. Après, j'aviserai,

répliqua Dean en se glissant au volant de sa nouvelle voiture.

De toute façon, l'entraînement ne débutera qu'une fois le

travail pour lequel j'ai besoin de toi sera terminé. Deux

heures d'entraînement en échange de chaque journée de

travail, qu'est-ce que tu en dis?'

— J'en dis que tu me tiens par les couilles, espèce

d'enfoiré. Mais je suis ton homme. De quoi s'agit-il, au juste

?

L'excitation détériorait passablement son langage.

— D'abord, et d'une, tu t'engages à parler correctement.

— Qu'est-ce que ça peut foutre ?

— Je vais refaire la toiture de ma sœur et elle sera

probablement dans les parages. Elle n'a pas besoin d'entendre

ton langage fleuri.

— Ta petite sœur ? s'enquit Gregor d'une voix toute

douce.

— Ne demande pas ça sur ce ton, rétorqua Dean en levant

les yeux au ciel.

— Quel ton ?

— Comme si ma sœur était la vitrine d'un pâtissier devant

laquelle tu baverais parce que tu n'aurais rien mangé depuis

trois jours ! N'oublie jamais que c'est ma sœur, d'accord?

Gregor éclata de rire.

— Si j'avais su que ta petite sœur serait dans le coin, tu

n'aurais même pas eu besoin de me promettre cet

entraînement. Dommage pour toi, tu m'as déjà donné ta

parole.

— C'est du gros boulot, Gregor, le prévint-il. Et il y en a

pour plusieurs jours.

— Tant mieux, se réjouit Gregor. Plus ça durera, mieux ce

sera. Je sens que je vais adorer chaque seconde de ce

chantier...